POURQUOI ICI, CE SI FORT SENTIMENT DE TANT DE BEAUTÉ ?
Cet automne, j’ai pris le chemin vers Compostelle.
Après un mois de de déconnexion des formations, des visites décalées, et déjà 500kms dans les pattes, j’entrais dans le cloître de Moissac.
Je ne m’attendais pas à un tel choc de beauté…
Une envie de saliver que je connais bien, signe personnel qui me dit que la je peux me passer de manger ce midi, la beauté du lieu comme seule nourriture va suffire.
Je fais le tour, je chope le guide conférencier attitré pour quelques questions et puis voilà quoi, toujours cette envie de toucher partout, de sentir la pierre blanche sous les doigts, de voir tous les angles, de sentir la chaleur qui rayonne.
Émotion rarement ressentie aussi puissante dans d’autres visites de merveilles romanes que j’ai pu vivre…
Et tous ces signes partout, ces histoires, et au milieu cet arbre immense, vivant…
Mais pourquoi donc le cloître de l’abbaye de Moissac dégage t il autant de beauté ?
On dit souvent que l’art roman est un sommet de sensibilité, dégageant à la fois de la force dans ses arcs et de la finesse dans ses dentelles…
Beaucoup des lecteurs de cet article, trouverons les raisons savantes et techniques bien sûr liées à l’architecture, et ils auront raison mais, la lumière de cette fin d’après midi apportait un éclairage rasant et chaud sur les pierres et la pelouse.
Il y avait autre chose…
Je restais longtemps à essayer d’analyser ce sentiment de beauté et de plénitude et je voulais comprendre pourquoi ici, c’est spécial…🥰
Une nuit plus tard, j’ai pu poser une hypothèse de ce qui se joue ici … et qui est ressenti par de nombreux visiteurs :
Adossé au flanc Nord de la puissante architecture de l’abbatiale, il y a ce cèdre devenu géant, au tronc massif et puissant. Cet arbre est entré dans la danse de la louange marchée et de la contemplation intérieure – qui est le rôle même d’un cloître dans la vie du moine/moniale…
Ce cèdre arrivé ici on ne sait comment durant le 18e siècle apporte aujourd’hui un sens majeur à l’identité du lieu.
Je m’explique : alors que les colonnes et chapiteaux affichent les détails de la vision de Dieu – et tente de donner un sens à la vie – à travers les scènes de l’ancien et du nouveau testament, la puissance créatrice, la nature et la vie biologique sont présentes dans le vert de cette pelouse et sous les larges branches du cèdre qui inondent la vision du visiteur du cloître.
Il y a donc la simplement sous nos yeux, les textes sacrés et la vision écrite par 3000 ans d’humanité et la vie issue du big-bang, l’eau des origines, les cellules organiques, les cellules végétales, qui créent les arbres immenses et offre ici une verticalité organisée qui unit le cloître et le ciel. La lumière de l’univers a travers notre étoile, le soleil, nous est ici reflétée en miroir par les atomes de la pierre de Saintonge et la chlorophylle des aiguilles de l’arbre…
Alors si je devais commencer une visite sensorielle dans ce Cloître, je masquerai le regard de mes visiteurs et je les guiderai d’emblée vers l’arbre, je poserai leurs mains sur l’écorce, je les ferai enlacer de tout leur corps ce tronc vivant, comme une résurrection au cœur de la pierre et ensuite seulement nous irions vers la pierre et ses dentelles sensuelles…
Et vous, qu’en pensez vous ?












